mercredi 14 mai 2008

Rentrer dans le moule... mais lequel ?

J’ai entendu un jour une femme dans la rue dire à sa fille/nièce/cousine/amie qui portait un bambin tout neuf « je suis heureuse que tu aies enfin une vraie vie. Ca ne pouvait pas durer, rester toute seule comme ça à ton âge c’est pas une vie ; et heureusement que vous n’avez pas trop tardé pour avoir bébéchou » (ou en substance quelque chose du même acabit). Les mots vraie vie m’ont marquée. Ainsi la vraie vie ce serait une vie de famille. Avec un mari et des enfants (si possible deux : un garçon et une fille, plus un chien et une maison de campagne, la perfection absolue).

Mince. Et moi alors, j’ai quoi en attendant, une fausse vie ?

Il y a quelques temps je discutais avec ma grand-mère au téléphone et la conversation a commencé à dévier, comme très souvent depuis ces derniers mois, sur mon célibat et ma non-maternité.
J’avais toujours pensé que ma grand-mère était une personne très open pour sa génération. Petite, elle me disait toujours qu’il ne fallait surtout pas se marier avec le premier ; qu’elle avait eu de la chance avec mon grand-père, mais qu’il faudrait toujours en essayer plusieurs pour savoir lequel est le bon ; que la virginité avant le mariage c’est du pipeau inventé par les hommes pour ne pas que les femmes puissent comparer leurs performances (héhéhé, elle était pas trop forte ma grand-mère ?!!).
Mais visiblement il y a une date d’expiration au célibat. Et je l’ai atteinte.

Quand elle a appris que j’étais séparée de l’ex, elle n’a pas tiqué, elle devait se dire que je retrouverais quelqu’un dans la semaine, voire que j’avais déjà quelqu’un d’autre. Au bout d’un mois et demi elle a commencé à revenir à la charge « mais tu cherches au moins ? » puis à me reprocher d’être trop difficile, pas assez ceci ou trop cela. J’ai réalisé que l’image que se fait ma grand-mère des célibataires trentenaires (des vieilles filles donc), c’est un mélange confus de femme trop exigeante, de lesbienne, de féministe acharnée et de laideur. Et au fond ce qui la dérange le plus, c'est pas que je corresponde ou pas à ce schéma, c'est que les autres puissent penser que sa petite fille n'est pas "mariable"...

En gros si une femme est seule c’est qu’elle a quelque chose qui ne va pas. Ce qui est amusant, c’est que si un homme est seul c’est aussi parce que les femmes ont quelque chose qui ne va pas.

J’ai tant bien que mal tenté de lui expliquer que j’étais la même personne que l’an dernier, que je n’avais pas besoin d’un homme pour exister et que je si je suis seule c’est que jusqu’ici je n’ai rencontré personne qui me convienne, sans succès. Après m’avoir répondu que je ne devrais pas trop faire la difficile, elle m’a dit en pleurnichant qu’elle « ne voudrait pas que je gâche ma vie ».

Double mince. Non seulement j’ai une fausse vie mais en plus je la gâche !

La semaine dernière, la mère d’une amie proposait d’allumer un cierge pour qu’elle se trouve quelqu’un ; une autre, en couple depuis plusieurs années, pestait parce que dès qu’elle prononce la phrase « j’ai une bonne nouvelle » on lui répond « t’es enceinte ! » ; il y a quelques mois, une personne bien intentionnée me conseillait de faire une demande d’adoption « ça prend du temps tu sais, tu ferais mieux de t’y mettre tout de suite », etc., etc., etc.…

Il y a des moments où j’ai juste envie d’avoir 20 ans à nouveau pour qu’on me fiche la paix. Cette pression permanente est fatigante.Et des fois tout ça finit par tellement me rentrer dans le crâne que j’ai l’impression que la vie se résume à un seul thème : trouver quelqu’un.

Et puis récemment, j’ai abordé ce sujet avec ma mère. Je lui ai demandé si elle se sentirait privée de quelque chose si je n’avais pas d’enfants. Son regard interloqué m’a répondu à sa place. J’ai compris que ma mère considère que je suis en train de réussir ma vie ; qu'elle est fière de ce que je suis. Pour elle, fonder une famille n’est pas un but en soi, mais une option parmi d’autres.
Et le seul conseil qu’elle a à me donner, c’est de vivre ma vie. La mienne.

6 commentaires:

Moni a dit…

Bonjour !
Un très bon exemple de l'influence du regard des autres sur la vie - celle des femmes dans ce cas précis -, reste à être assez fort pour ne pas en tenir compte.
Je ne suis pas sûr de pouvoir comprendre vraiment ce que tu ressens quand on te fait des remarques, mais j'ai moi même souvent le droit à des réflexions sur mon mode de vie, mon métier, le fait que j'ai arrêté mes études... Je fini par me dire qu'à partir du moment ou les gens sont proches et que leur avis m'importe, tout ce qu'ils vont me dire sonnera comme un reproche, alors maintenant, j'écoute ce qu'on me dit et puis je fais le trie :)

Fyfe a dit…

Elle est géniale ta maman !
Quand quelqu'un te dira que tu gâches ta vie, tu pourras répondre "toi-même, moi j'ai trop de la chance ma maman elle m'aime comme je suis d'abord" :)

La grande Cam a dit…

tout pareil que Fyfe ! ;-))
Hélas, il y a encore beaucoup trop de personnes sur cette terre qui n'ont pas vu évoluer le monde, et qu'effectivement de nos jours la vie de couple et/ou de famille est devenu un choix plus une obligation!
Mais bon, tu finiras bien par le trouver ton prince charmant sur son destrier d'argent... ok, je blague, et ok... je sors... :-D
mais je reviendrai parce que j'aime bien ton style !

cerolinet--blog[at]yahoo.fr a dit…

Multimoni,
C'est vrai qu'il n'y a pas que dans ce domaine qu'on a droit à des remarques. Mon frère avait eu droit aussi aux foudres de la grand-mère quand il avait décidé de ne pas passer le bac...
Je pense être assez forte justement pour ne pas faire forcément ce qu'on attend de moi, mais ça n'en reste pas moins usant d'entendre encore et toujours les mêmes remarques.
[Haaan, je suis victime de harcèlement moral en fait !! Tu crois que je peux porter plainte contre ma grand-mère ? ;o) ]

Fyfe,
Ouais elle est vraiment géniale ma maman, je suis bien consciente de la chance que j'ai de l'avoir !
Surtout que c'est pas qu'une maman géniale c'est aussi une femme super et que j'admire bcp.

Cam,
Bijouuuuuur et bienvenue !
Oui il y a bcp de gens qui sont trop étroits d'esprit pour considérer que les aspirations des autres sont aussi valables que les leurs.
Pour ma part j'espère bien qu'un jour je vais rencontrer qqn que j'aurais envie de laisser entrer dans ma vie, c'est sûr que c'est plus fun à deux ! Mais si ce n'est pas le cas je n'en ferai pas un drame non plus.
[Contente que mon escargot te plaise, tu reviens quand tu veux !]

Anonyme a dit…

Ta mère a raison !
Il y a des gens pour qui faire des enfants est le but ultime mais c'est loin d'être le cas pour tous...
Pour ta grand-mère, elle se base sur sa génération : à 30 ans leur vie devait déjà être construite et déterminée. Aujourd'hui tout est différent, on meurt très tard, on trouve du boulot tard, et il n'est pas rare de voir des femmes avoir des enfants après 35 ans alors qu'avant cela paraissait impossible.
Peut-être qu'elle s'inquiète pour toi mais j'ai pas l'impression que tu sois "malheureuse"...
Le truc de la "vraie vie" m'a bien fait rire !

cerolinet--blog[at]yahoo.fr a dit…

Zofia,
Oui le coup de la vraie vie est une petite perle !
Quand à ma grand-mère, je lui pardonne bien sûr, eut égard à son grand âge et aux différences générationnelles entre nous. Je lui pardonne d'autant plus facilement qu'en effet, je ne suis pas malheureuse. ;o)